Maudits silmarils : maudits bonus du livre 1 by Dilly

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Le canon

Bonus au chapitre 48. Mon défi pour cette scène a été de faire parler tous les membres de la Table ronde.


Le canon

 

« Cette discrimination à l'égard des femmes minces, ça commence à devenir insupportable ! », s'exclama Aredhel.

« Et pourquoi donc ? », demanda Turgon.

« Les femmes de cette ville qui ont des cuisses minces se font railler par les machistes noldorins ! Ils semblent penser que nous nous devons de ressembler à toutes ces statues aux membres épais qui ornent les frontons ! »

« C'est vrai que c'est un peu ridicule, cette mode des grosses cuisses », acquiesça Galdor, qui était un Sinda.

« Pourquoi cela ? », demanda le roi. « Je trouve que c'est des plus esthétiques. »

« Hum... Tu dis ça maintenant, mais tu oublies qu'Elenwë n'avait pas de grosses cuisses ! », répliqua sa soeur.

Le visage de Turgon se colora.

« Oui mais Elenwë ce n'était pas la même chose... », marmonna-t-il.

« Franchement, je ne vois pas où est le problème », déclara Egalmoth. « Les goûts ne se décident pas... Tant pis si certaines se sentent dédaignées et blessées dans leur amour propre. »

« Au contraire ! » s'exclama la Blanche Dame des Noldor. « Les goûts sont soumis à toutes sortes d'influence. Et ce canon des grosses cuisses n'est qu'une manière de plus de contrôler le corps féminin, et donc la vie des femmes elles-mêmes ! »

Salgant soupira.

« Toutes ces femmes minces, moi, ça me déprime... », dit-il.

« De toute façon, chacun sa morphologie », ronchonna Duilin, qui se sentait étrangement observé ou consciemment évité du regard, depuis le début de la discussion – tout le monde pensait à sa fille.

Galdor hocha la tête à cette sage remarque.

« Non, au fond, c'est un manque de volonté... », professa Egalmoth. « Si elles s'entretenaient et voulaient plaire aux hommes, elles arrêteraient de courir partout et surveilleraient leur alimentation. C'est bien gentil de manger des fruits et des légumes pour se faire plaisir... Mais comme on dit, il faut souffrir pour être belle ! »

« Mais nous ne sommes pas des volailles qui ne vivent que dans l'attente d'être mangées ! », répondit Aredhel.

Et elle sortit de la salle en claquant la porte.

« Quel caractère... »

« Il y a quelque chose que je ne comprends pas... », dit alors Glorfindel. « Quand nous étions à Valinor, on vantait la beauté des femmes minces et sportives. Pourquoi cela a-t-il changé depuis que nous sommes arrivés en Beleriand ? »

« Bonne question... », dit Enerdhil.

Penlodh se racla la gorge.

« Cela a sans doute un rapport avec la modification des conditions de vie, et l'instabilité des moyens de subsistance. Ce qui est rare et atteste d'une position sociale haute et sécurisée devient alors enviable. »

Glorfindel et Rog hochèrent la tête.

« L'influence du développement de la statuaire et de ses contraintes n'est aussi pas à dédaigner, je pense », poursuivit Penlodh. « Et pour ma part, je pense que la dame Aredhel a raison... »

Une fois de plus, l'imagination matrimoniale de Turgon s'enflamma. Qui sait si entre lui et sa soeur...? Il ne saurait exister de meilleur beau-frère.

« Bonjour », dit Ecthelion en entrant.

« Vous êtes en retard. »

« Mon écuyer était malade cette nuit... Alors j'ai dû m'occuper de lui », dit-il tout naturellement en posant son casque et ses armes sur la table, sans se soucier du bruit qu'il faisait.

Le roi plissa les yeux.

« Mais faites », dit-il ironiquement d'une voix douce.

« Merci », répondit Ecthelion.

Il acheva de s'installer, et s'aperçut que son vis-à-vis, Voronwë, le considérait avec un visage empli de pitié navrée.

« Quoi ? », fit le seigneur de la Fontaine.

 

 


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