Maudits silmarils : maudit AU by Dilly

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La philosophie I


La philosophie I

 

Un soir de semaine comme tant d'autres, Laurent Findel faisait quelques courses au Monoprix de son quartier, son panier rempli de produits sans gluten sous le bras gauche, et l'autre tendu, la pointe des doigts hésitant, d'un shampoing pour cheveux blonds éclaircissant à l'autre. Lequel choisir ? Aucun n'était avare de promesse : éclaircissement naturel, hydratation, brillance, souplesse, « kiss by the sun », plage, illuminat...

« Moi je prends celui-là », dit soudain une voix derrière lui. « Ça m'évite d'avoir l'air rousse. »

L'ancien champion d'escrime se retourna. C'était une ravissante jeune femme, aux cheveux qu'il qualifierait de « blonds vénitiens », et aux yeux très clairs, qui venait de lui parler. Elle n'avait pas de panier ou de caddie, juste un rouleau de papier cadeau à la main, et un sac cabas en cuir porté sur l'épaule.

« Je ne vous ai pas déjà vue quelque part ? », se demanda Laurent Findel à haute voix.

« Peut-être… Je crois que nous habitons dans le même immeuble. »

« Oh. Laurent Findel, je suis enchanté. »

« Nina Lodh. »

En un instant, charmé par ce sourire, les yeux de l'escrimeur blond captèrent les longs cils, l'arrondi de la lèvre inférieure, la poitrine saillant sous le haut cache-coeur, le renflement élégant des hanches sous la taille. Elle a l'air si aimable et sympathique, conclut-il.

« Ainsi… Vous me conseillez celui-ci ? »

« Absolument. Il est un peu plus cher, mais vraiment efficace. »

« Hé bien… Merci. »

« Je vous en prie. Il faut bien qu'on s'entraide ! »

Puis elle fit volte-face et remonta le rayon vers l'allée centrale d'une démarche à la fois aérienne et chaloupée, ses cheveux brillants rebondissant sur son dos – un trajet dont Laurent Findel ne perdit pas une miette.

Une fois qu'elle eut disparu, il rangea le shampoing dans son panier, puis décida de faire un dernier arrêt au rayon des graines et fruits secs. Cependant, il ne cessait de penser à la rencontre qu'il venait de faire… N'était-elle pas merveilleuse ? Comme légèrement ivre, il prit place dans la première file venue, aux caisses.

« Décidément... »

Nina Lodh, qui se trouvait juste devant lui, lui sourit à nouveau.

« Oh, je ne l'ai pas fait exprès », répondit Laurent Findel maladroitement.

Ou en tout cas il eut l'impression d'être très maladroit intérieurement, alors que quelqu'un d'autre aurait tout simplement eu l'impression qu'il faisait une plaisanterie.

« Vous aimez les amandes ? », fit-elle remarquer.

« J'avoue… C'est mon péché mignon. »

« Moi aussi j'adore ça… »

L'entraîneur était vraiment sous le charme. Il sentait même une légère sensation électrique descendre son corps… Il se passait indéniablement quelque chose entre eux.

Est-ce qu'il devait maintenant… proposer quelque chose à Nina ? L'inviter à boire un verre, peut-être ?

Ce fut à ce moment que ses yeux accrochèrent le contenu du sac cabas de la jeune femme, qui avait quitté son épaule, et reposait maintenant sur le carrelage du supermarché. On ne voyait pas grand-chose, mais un livre en dépassait, avec un marque-page de librairie à son milieu. Ainsi, Nina Lodh lisait quelque chose en ce moment... Peut-être un roman qu'il connaissait, voire appréciait ? De quoi relancer la conversation, et se trouver peut-être un autre intérêt commun ? Mais Laurent Findel pâlit d'un coup. Le titre du livre était caché, seules étaient visibles les lettres composant le nom de l'auteur.

Des lettres qui, dans le monde entier, étaient synonymes de terreur...

JACQUES DERRIDA


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