Maudits silmarils, livre 1 by Dilly

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Les thermes


Chapitre 28 : Les thermes

Chronologiquement parlant, cet épisode se déroule entre « Prison Break » et « L’acculturation ».

 

Plusieurs mois avant ces événements, il avait fallu un certain temps à Ecthelion pour enseigner les rudiments de l’hygiène et de la cosmétique elfiques à son écuyer humain.

Après lui avoir montré comment se servir de son étuve personnelle, et l’y avoir habitué, il l’emmena dans les nouveaux thermes inaugurés depuis peu.

Il s’agissait d’un bâtiment immense, surmonté d’un dôme, et couvert de peintures et de sculptures. 

« Ces nouveaux thermes sont plus grands que les anciens, que je n’aimais guère », expliqua Ecthelion, « et ils ont été construits par le roi lui-même, à la semblance de ceux de Tirion. »

Belin avait l’air soufflé.

« Le roy est sûrement un grand magicien pour construire ça tout seul ! »

Ecthelion n’eut pas le courage de commencer une explication. Ils entrèrent. 

Après un rapide passage au vestiaire, l’elfe annonça à son écuyer : « Voici le premier bain. »

Il y avait plusieurs petits bassins dont l’eau était vidangée après chaque passage.

« Dans ce bain-ci, on commence par se laver. Mais pourquoi… ? »

Ils étaient tous les deux nus, comme les autres baigneurs, mais le jeune humain marchait avec ses mains posées sur son entrejambe.

« Oh, vous êtes pudique… »

Il retourna dans la salle précédente et revint avec une serviette blanche.

« Mettez ça autour de vos hanches, si vous vous sentez gêné. »

Il se glissa dans le premier bassin de libre et intima à Belin de le rejoindre.

« Comment qu’ils font pour avoir de l’eau toute chaude comme cela mon sire ? »

« Il y a des chaudières en dessous. Vous ne vous imaginiez pas qu’un tel confort pouvait exister, n’est-ce-pas ? Vous voyez, les bains publics sont un élément fondamental de la civilisation noldorine. C’est un lieu où l’on entretient son corps, où l’on vient se délasser après le dur labeur de la journée – que vous soyez soldat, scribe, artisan ou autre… Un lieu de convivialité et de sociabilité où les gens prennent des nouvelles les uns des autres et parlent politique. En ce qui me concerne, je préfère me laver chez moi, je n’aime pas vraiment discuter avec les gens. Mais si je peux y aller avec vous, ce n’est plus pareil. Et ces thermes-là sont autrement plus pratiques et esthétiques que les anciens. »

« Mais pourquoi vouloir se laver en s’parlant, messire ? »

« Ne cherchez pas à comprendre. Maintenant prenez votre savon. »

« Je ne l’ai point monseigneur. Je l’avais laissé dans l’étuve de chez vous, mais depuis une semaine, je ne l’trouve plus. »

« C’est vrai, j’avais oublié… C’était l’espèce de gros cube avec des fissures et du moisi ? »

Belin hocha la tête.

« Je l’ai jeté », avoua Ecthelion. « Mais ce n’est pas grave, nous allons utiliser le mien. »

Il sortit de sa serviette un magnifique savon en forme de rosace.

« Vous voyez ? C’est un savon elfique de base. Il contient des huiles pour adoucir la peau, et des reliefs et du sel pour décoller la saleté. Vous le prenez dans votre main et vous frottez de manière circulaire. Je vais vous montrer. Tournez-vous. »

Belin s’exécuta. Ecthelion vint derrière lui et commença à lui frotter le haut du dos avec le savon.

« Vous n’frottez point plus fort, messire ? »

« Non, sinon je vais vous abîmer la peau. Tournez-vous encore. »

Il se mit à lui frotter le torse.

« Messire, il y a un elfe qui vous a fait un clin d’œil. »

« Ne faites pas attention, je suis habitué.»

Une fois qu’ils se furent lavés, ils se dirigèrent dans le deuxième bain, le bain collectif, qui consistait en un grand bassin rempli d’eau chaude.

« Ici, la chaleur va ouvrir vos pores », expliqua Ecthelion. « Mais c’est surtout un temps de délassement et de discussion. Ensuite, on termine par le bain glacé, dans les salles froides, pour refermer les pores et stimuler la circulation sanguine. »

Ils s’installèrent dans un coin du grand bassin. Sur la voûte de l’immense salle, une fresque représentant un ciel valinorien d’un bleu magnifique les surplombait.

Les cheveux mouillés de Belin cachaient ses oreilles, et il regardait le décor et les elfes autour de lui avec curiosité. 

« Essayez de vous détendre », dit Ecthelion.

Mais dix minutes plus tard, l’elfe qui leur avait fait un clin d’œil s’approchait d’eux en nageant.

« Bonjour beau seigneur », dit-il à Ecthelion. « C’est votre compagnon ? »

Il désignait Belin.

« Oui », répondit Ecthelion, se méprenant sur le sens de la question.

« Je m’en suis douté quand j’ai vu la façon dont vous lui frottiez le dos tout à l’heure. »

Le seigneur de la Fontaine fronça les sourcils.

« Cela se voit que vous êtes très amoureux. C’est si réconfortant de constater que la nouvelle génération ose s’afficher au grand jour. Si seulement nous avions tous votre courage. Mais hélas, Valinor n’était pas un paradis pour tous… »

« Mais de quoi parlez-vous, au juste ? », demanda Ecthelion. « Et je ne suis pas amoureux de qui que ce soit. »

L’autre elfe eut l’air déçu.

« Non… Je ne parlais de rien. »

Il lui donna une tape sur l’épaule et fit demi-tour.

« Quel curieux personnage », dit Ecthelion.

Belin eut un soupir de soulagement. Il craignait que son maître n’allât saisir l’autre elfe par les cheveux pour les lui couper.

Ils sortirent du bassin quand ils commencèrent à avoir la peau des doigts fripée.

 


« Ce n’est pas Ecthelion de la Fontaine ? », dit un elfe à ses camarades, tandis qu’il se dirigeait vers le fond de la salle.

Le chevalier et son écuyer suivaient le même itinéraire qu’eux, mais en sens inverse.

« Je crois que si… Et ce n’est pas son écuyer, avec lui ? »

« Il me semble que oui. Mais pourquoi porte-t-il une serviette autour des hanches ? »

« Va savoir… Sans doute un vêtement barbare… Une sorte de pagne, ou quelque chose dans ce goût-là… »

« Tout de même, je ne sais pas si on devrait autoriser des Humains à se baigner dans les mêmes bassins que nous… »

« Parle moins fort… Il nous a vus… »

Belin les regardait fixement de ses yeux bleus.

« Il nous regarde… »

« Non… Ce n’est pas nous qu’il regarde… Il nous regarde le… »

« Pourquoi il nous regarde le… ?? »

 


L’humain fut rassuré par ce qu’il observa. 

« Finalement, on est faits pareil », songea-t-il.


Chapter End Notes

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