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Chapitre pastiche de la série d'épisodes "Unagi" dans Kaamelott... (enfin j'ai essayé)
Chapitre 37 : Unagi
Au crépuscule, les onze seigneurs des Douze Maisons de Gondolin étaient réunis dans la salle du conseil, autour de la Table Ronde. Tous, sauf Penlodh, qui était en train de souffler les bougies et de couvrir les lampes fëanoriennes.
« Mais qu'est-ce que vous faites ? », demanda Rog. « On ne va plus rien y voir ! »
« Non... », répondit l'Intendant. « Une seule suffira, je vous assure. »
Il ne laissa qu'une bougie allumée, puis vint s'asseoir. Le soleil se coucha derrière les montagnes de l'Echoriath.
Un instant, les seigneurs elfes crurent qu'ils allaient être plongés dans l'obscurité. Mais ce fut au moment où les ténèbres semblaient avoir totalement envahi la pièce que d'un seul coup, des myriades de lumières de toutes les couleurs apparurent sur les murs.
« Quelle est cette étrange phénomène ? », s'étonna Rog. « Une invention que je ne connaissais pas ? »
Mais il comprit encore moins quand les lumières se mirent à bouger. Alors, suivant le regard de Penlodh, il vit qu'Egalmoth était lui aussi en train de bouger. Et la lumière de l'unique bougie de la pièce se répercutait sur les pierres de ses bagues, les facettes du gros diamant de sa mante et la multitude d'opales et de pierres précieuses cousues sur ses vêtements.
Le marchand prit la parole : « Ça vous en bouche un coin, pas vrai ? »
* * *
Ecthelion et son écuyer se trouvaient devant le roi, en simples tuniques d'entraînement athlétique. Leur front était ceint d'un bandeau, à la manière de certains Nandor.
« Vous avez emmené votre humain ? », constata Turgon avec curiosité.
Il se mit à tourner autour de l'adolescent, en l'observant sous toutes les coutures.
« Oh, il est si petit et doré.... Et il a des oreilles toute rondes, comme les souris... Qu'il est mignon... »
Il se pencha pour lui sourire, et lui flatta la tête avec sa grande main.
« Bon », l'interrompit Ecthelion. « On n'était pas venu pour ça. »
« Vous ne voudriez vraiment pas me le prêter, un de ces jours ? »
« Non. »
Le sourire de Turgon se défit, pour arborer le visage d'un roi aux traits sages et morganatiques comme sculptés dans la pierre. Il se redressa, et revint s'asseoir sur son trône. Si lui et son frère aîné étaient très dissemblables, on devait leur accorder un point commun : ils étaient tous les deux capables de changer de visage brusquement, pour mimer le plus grand sérieux.
« Je vous écoute. »
« Sire, nous sommes venus vous présenter une nouvelle technique de combat. »
« Ça commence mal », pensa Turgon.
« Majesté, dans vos casernes, on ne pratique que le combat à l'arc, la lance ou l'épée. Mais quel est le point commun entre ces trois actions ? »
Le roi se frotta le menton.
« Ils nécessitent de posséder une arme ? »
« Très juste sire. Mais mis à part l'arme, quel est l'autre condition impérative au combat armé ? »
Ecthelion parlait avec cet insupportable ton à la fois didactique et agressif qu'il employait dans ses discours à la caserne.
« Pff... J'en sais rien... Le bras qui tient l'arme ? »
« Très bien Sire ! », répondit Ecthelion.
Belin hocha la tête.
« Mais qu'advient-il si par malheur, on me tranche les deux bras ? », ajouta Ecthelion. « Je ne peux plus utiliser les armes traditionnelles... Je dois donc utiliser mes autres membres . »
Mais il n'aurait pas dû utiliser le mot « membre », car Turgon eut une remontée mentale d'un certain incident dans une fontaine.
« Qu'est-ce qu'il y a de drôle ? »,
« Non, rien... C'est juste que si on vous tranche les deux bras, vous êtes mort. »
« Non... », répondit Ecthelion en fronçant les sourcils.
« Si Ecthelion, si on vous tranche un bras, déjà vous n'en avez plus pour longtemps, parce qu'il y a tout le sang des artères tranchées qui se met à gicler hors de votre corps. Si en plus on vous a tranché les deux, vous tombez direct dans les pommes et vous mourrez. Et je dis ça, c'est pas d'avoir suivi des cours d'anatomie. J'ai participé aux deux batailles de Fingolfin en Beleriand, et des elfes qui se font couper en tranches, je peux vous dire que j'en ai vus un paquet. »
L'espace de quelques secondes, Ecthelion eut l'air perdu. Puis il reprit :
« En fait, ça ne change rien. Quelle que soit la cause de la perte des bras... La question est : que dois-je faire si mes bras sont inutilisables, pour quelque raison que ce soit ? Je dois utiliser mes autres membres ! »
Il se tourna vers Belin.
« Ordonnance, quels sont donc les autres membres dont je dispose ? »
« La tête messire », répondit l'humain, qui avait bien appris sa leçon.
Il fit signe aux soldats qui les accompagnaient, et qui étaient restés en arrière, de leur apporter ce qu'il tenait dans les mains. Il s'agissait d'un petit banc, qu'ils posèrent devant Ecthelion, et sur lequel ils entassèrent des tuiles en argile.
« Je ne suis pas sûr que... », commença Turgon.
Mais le Seigneur de la Fontaine ne l'entendit pas. Il s'agenouilla devant le banc et donna un coup de tête dans les tuiles.
Les tuiles ne se cassèrent pas, mais on entendit un gémissement. Quand Ecthelion se redressa, il avait une rigole de sang qui lui coulait sur le front.
« Mais il s'est ouvert le crâne cet abruti !! »
« Je ne comprends pas majesté, j'y étais arrivé tout à l'heure... »
* * *
Une heure plus tard, Ecthelion était de retour, avec cette fois un bandage épais autour de la tête.
« Précédemment, sire, nous avons acquis la certitude qu'en cas d'immobilisation des bras, le combattant devait se servir de ses autres membres. Nous avons vu qu'il y avait d'abord la tête, raison pour laquelle certains heaumes, comme ceux de ma maison, sont munis de pointe. Mais cela, ce n'est pas très original. Il reste d'autres membres dont il est possible de se servir. Lesquels ? »
« Je ne vois pas... », répondit Turgon.
« Les jambes. Mais contrairement à ce qu'on pourrait croire, elles peuvent faire toutes les choses que font les bras. Premièrement, elles peuvent servir à donner des coups. »
Il mima des coups de pieds et de genoux donnés à Belin.
« Mais elles peuvent aussi servir à immobiliser l'adversaire, en le prenant en tenaille aux niveau des hanches. »
A ces mots, il posa ses deux mains sur les hanches de Belin, qui rosit timidement.
« Là, je vais enserrer sa taille avec mes jambes, pour l'immobiliser », expliqua Ecthelion.
Et il bondit plusieurs fois en élevant les cuisses puis les mollets pour essayer d'attraper la taille de l'humain avec ses seules jambes. Mais il y avait un problème de coordination ou de gravité, car tout ce qu'il arrivait à faire était frôler les côtés du pantalon de son écuyer.
« Quel succès... », fit observer Turgon.
« Vous verrez, je finirai par arriver à enserrer sa taille avec mes cuisses ! », s'exclama Ecthelion.
« Mais vous faites ce que vous voulez de votre temps libre, tous les deux... », répondit le roi. « Moi ça ne me regarde pas. »
"...et le bras gauche d'Ecthelion reçut une blessure douloureuse d'un fouet des Balrogs et son bouclier tomba à terre au moment même où ce dragon de feu approchait dans l'effondrement des murs. Alors Ecthelion dut s'appuyer sur Tuor, et Tuor ne put le quitter [...]
...et ce Gnome fonça sur le démon, et pourtant ne lui infligea pas la mort, mais reçut une blessure à son bras droit si bien que son arme lui échappa. Alors bondit Ecthelion, seigneur de la Fontaine, le plus beau parmi les Noldoli, droit sur Gothmog alors même que celui-ci levait son fouet, et il enfonça au plus profond de ce sein maléfique son heaume qui avait une pointe sur le dessus, et il serra ses jambes autour des cuisses de son ennemi ; mais tous deux chutèrent dans le bassin de la fontaine du roi qui était très profond."
J.R.R. Tolkien, Le Second livre des contes perdus.