Maudits silmarils, livre 1 by Dilly

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La vie sexuelle des elfes


Episode 39 : La vie sexuelle des elfes

 

« Vous rendez-vous compte que l'on dit… que Fëanor allait jusqu’à faire l’amour avec sa femme… »

Ecthelion fit une pause pour garder le suspens. Belin attendait la suite avec avidité.

« Une fois par semaine. »

L’air déconfit et piteux de Belin ne s’arrangea pas.

« Une fois par semaine valianne ! Vous vous rendez compte ? De vrais animaux… »

L'elfe secouait la tête avec dégoût. Mais le jeune humain pensait : « Et dire que si’j’pouvions j’le ferions tous les jours... »

* * *

Belin le Blond n’était pas au bout de ses surprises. Un jour qu’il était seul dans l’appartement, il se mit à compulser les livres de la bibliothèque à la recherche d’ouvrages avec peu de textes, car dans son apprentissage de la lecture, il peinait encore à déchiffrer autre chose que des noms propres. 

Ce fut ainsi qu’il tomba sur un codex épais rempli d’illustrations, dont il tenta de saisir le titre sur la tranche, qui était écrit en tengwar. « Les au-treu… choses… de… la… mour », lit-il à voix haute. Il ouvrit le livre. La première page représentait une femme et un homme elfes, tous deux nus, et se tenant la main.

L'adolescent rougit, puis tourna la page fébrilement.

Il y avait d’abord du texte avec des dessins de plantes… Des dessins représentant une femme-elfe enceinte, et l’on voyait, à l’intérieur du ventre, la matrice contenant le bébé à naître. Un deuxième chapitre, ensuite, détaillait la constitution des parties génitales.

« Ces elfes sont vraiment faits comme nous », pensa Belin.

Mais le troisième chapitre le fit à nouveau rougir. On y voyait l’homme et la femme fées pratiquer l’acte de conception dans différentes positions. Il y avait également des calendriers marquant les jours de fécondité d’une femme-elfe pendant un trimestre, des recettes d’infusions, ainsi que des dessins représentant des sortes de vêtements dont on revêtait le membre masculin à des fins que Belin ignorait.

Le quatrième chapitre était intitulé « Les choses de l’amour avant le mariage », et Belin en fut durablement traumatisé. Apparemment, avant de se marier, un homme et une femme-elfe, outre s’embrasser, pouvaient faire plein d'autres choses. Il y avait différents types de baisers tout d’abord. Puis des baisers à des endroits improbables, sur les parties intimes de l’un et de l’autre.

Et tandis qu'il tournait les pages, les joues de l’adolescent étaient devenues aussi chaudes que des poêles à crêpes sindarines.

Il vit un dessin dans lequel l’homme-elfe utilisait sa main à la place de son membre viril. Un autre sur lequel il le plaçait tout en haut entre les jambes de la femme, sans entrer dans ce que le livre appelait la « fleur sacrée ».

Le cœur battant, Belin tourna les dernières pages, puis essaya de remettre le livre en place de façon à ce qu’on ne vit pas qu’il avait été déplacé. D’ailleurs il avait du mal à croire qu’Ecthelion puisse posséder un tel livre. (En vérité, ce livre avait appartenu à ses parents, mais cela Belin l’ignorait)

A partir de ce jour, quand il était seul, souvent, l’homme allait ouvrir le livre, imaginant tout ce qu’il aurait pu faire avec les jeunes filles elfes qui l’entouraient, si seulement elles n’avaient pas passé leur temps à le repousser.

* * *

« Le fondement du mariage elfique », expliqua un jour Ecthelion à Eudes et Robert, « est la possibilité de la conception d’enfants. Et vous devez bien comprendre que les choses de l’amour sont très intimes chez les Noldor. Par exemple, en public, il est difficile d’envisager de faire davantage que se tenir la main ou se donner un rapide baiser du bout des lèvres. Tout ce qui dépasse ces choses entre dans la sphère du privé. Sans doute parce que les elfes y mettent beaucoup d’eux-mêmes, et plus de sensibilité que les humains en général. »

« Dis donc, ton maître, il a l’air de drôlement s’y connaître sur la chose », murmura Robert à son frère, impressionné par l'autorité de son ton.

« Non, en fait il ne s’y connaît pas du tout », répondit Belin.

Ecthelion poursuivit, du même air doctoral.

« C’est pourquoi les Noldor parlent peu de sexe, et font preuve de beaucoup de pudeur et de délicatesse à ce sujet. Je dis bien en général. Car bien sûr, il y a des exceptions. »

* * *

« Ah la la… C’est quoi ce fourbi ? », s’enquit Egalmoth en avisant l’amas de feuilles que Penlodh était occupé à trier dans son bureau.

« Je m’étonne que cela vous intéresse, seigneur Egalmoth », répondit Penlodh. « Ce sont des notes que j’ai collectées au sujet des lois et coutumes des Eldar… En vue d’en faire un livre de référence. »

« Toutes les coutumes ? Le mariage y compris ? », demanda Egalmoth.

« Oui. Cela peut être utile pour expliquer notre façon de vivre aux autres peuples et races, ainsi que pour les générations futures. »

« Hé bien », conclut le marchand, « tel que je vous connais, prions Eru que si notre civilisation venait à disparaître, ce ne soit pas le seul livre qui reste… Ou que ceux qui en prennent connaissance aient un minimum de sens critique... Parce que dans le cas contraire on va passer pour de ces coincés du cul ! »

 


 Epilogue

 

Plusieurs siècles auparavant, en Valinor.

 

Le marbre était une commande, une statue équestre d'Oromë. Nerdanel ôta le drap qui la recouvrait, pour la montrer à son époux, venu s'enquérir de l'avancée de son travail. Les yeux du fils de Finwë s'illuminèrent tandis qu'il parcourait l'oeuvre incarnant dans la pierre le mouvement du chasseur et son âme.

« Quel génie puissant... », ne put-il s'empêcher de dire.

Il se tourna alors vers sa compagne – ses cheveux châtains aux reflets chauds, son visage au teint un peu rouge. Nerdanel n'est pas parmi les plus belles, disaient-ils.

Un brasier blanc brûlant dans chacun de ses yeux, Fëanor l'agrippa pourtant par le col, l'embrassa avec passion, la renversa sur une table de l'atelier.

« Mais… Fëanor, pas  encore ! »

* * *

Une semaine plus tard, c'était au tour de Fëanor de montrer à sa femme sa dernière création.

« Argent et cryolite », précisa le fils de Finwë.

Nerdanel prit le bijou dans ses mains et l'examina, demanda des détails sur sa conception.

Alors Fëanor, celui parmi les Enfants d'Iluvatar dont le feu de l'esprit était le plus brûlant, expliqua à son épouse, elle aussi versée dans les arts de l'orfèvrerie et le travail du métal, les différentes étapes de son raisonnement ainsi que les particularités de l'exécution.

« Quelle ingéniosité... », apprécia Nerdanel, les sourcils froncés. « Toute cette intelligence, c'est tellement... »

...Excitant. Le visage empourpré et les yeux avides, elle arracha le tablier de forgeron de son mari.

« Allonge-toi sur la table !», ordonna-t-elle.

« Quoi... encore ?! »

 


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