Maudits silmarils, livre 1 by Dilly

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Les autochtones


Chapitre 7 : Les autochtones

 

Minuit était passé depuis longtemps quand le roi Turgon bondit hors de son lit à baldaquin pour aller tambouriner sur la porte la plus proche.

« Penlodh ! Réveillez-vous ! »

Il dut attendre quelques minutes avant qu'un Penlodh en chemise et bonnet de nuit ne lui ouvre, une chandelle à la main.

« Que se passe-t-il, mon roi ? »

« Excusez-moi mon bon, mais si je me permets d'enfreindre les règles de la bienséance en vous réveillant à cette heure indue, c'est que le groupe de Sindar a recommencé à chanter juste sous la tour ! C'est impossible de fermer une oreille ! »

Les deux elfes se rendirent sur le balcon. Dix étages plus bas, un groupe de musiciens aux cheveux d'un blond cendré étaient en effet en train de jouer et chanter, et cela avec moult rires cristallins.

« Ils ne peuvent pas aller chanter ailleurs ?! Et puis c'est quoi cet instrument ? »

« Je crois qu'il s'agit d'une vielle, mon seigneur. »

« Argh, et cette langue... Je ne m'y ferai jamais ! »

 


 200 ans plus tôt, Mithrim.

 

« Voici donc les indigènes de cette contrée, les elfes gris de Beleriand, également appelés Sindar », constata Turgon devant l’ambassade autochtone.

« Kenavau ! », répondirent les Sindar.

« Quelle étrange langue », s’étonna Turgon. « Penlodh, vous qui êtes un elfe de science… A votre avis, qu’ont-ils bien voulu nous dire ? »

« Le Sinda est une langue celtique », expliqua le Noldo. « Si je peux légitimement me fonder sur sa parenté avec la langue teleri de Valinor, il me semble que nous pouvons raisonnablement en conclure que cela veut dire quelque chose comme Salutations ou Bonjour. »

« Fort bien. Mais que veut dire celtique ? », demanda Turgon.

« Je l’ignore, c'est un terme que l’on rencontre dans les livres donnés par les Valar. Mais il n’a pas lui-même de définition. Peut-être s’agit-il seulement d’un terme générique créé au hasard. Cela dit, je n’ai jamais réussi à retracer son étymologie. »

« Encore un mystère divin. Parfois j’ai l’impression qu’on nous cache des choses.»

 


 

« C’est comme quand il dit que le Quenya est une langue finno-ougrienne », maugréa Rog le forgeron, le chef de la Maison du Marteau de la Colère. « J’ai une tête de Finno-ougrien, moi ? »

« Mais au fait, que veut dire finno-ougrien ? », demanda Glorfindel.

Tout vêtu de blanc jusqu’aux collants et chausses, il brillait dans la forge sombre et rouge de Rog comme une grande marguerite.

« Je ne sais pas. J’ai demandé à Penlodh, pourtant. »

« Vous êtes un homme curieux. »

« Mais il a dit qu’il ne savait pas. Cela s’appelle comme cela, c’est tout. Ce sont les Valar qui l’ont dit. »

« Vous n’avez jamais remarqué que lorsque les érudits ne savent pas quelque chose, ou qu’ils ne veulent pas qu’on les contredise, ils disent toujours que cela vient des Valar ? »

« Si vous voulez mon avis, c’est en effet une bonne excuse. »

« Mais quelque part, c’est pratique. »

 


 

« Et celui-ci, la flûte avec une sorte de grosse poche ? », demanda Turgon sur son balcon.

« Une cornemuse, majesté », répondit Penlodh.

 

 


 

Chant teleri

 

C'est pas l'elfe qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'elfe
Moi la mer elle m'a pris
J'me souviens un mardi

J'ai troqué mes bottines
Et mon vieux manteau sale
Contre une paire de sandales
Et une cape bleu marine

J'ai déserté les crasses
Qui m'disaient « Soit prudent »
La mer c'est dégueulasse
Les poissons font dedans

Dès que le vent soufflera
Je repartira
Dès que les vents tourneront
Nous nous en allerons !

C'est pas l'elfe qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'elfe
Moi la mer elle m'a pris
Au dépourvu
Tant pis

J'ai eu si mal au coeur
Sur la mer en furie
J'ai vomi mon quatre heure
Et mon minuit aussi
J'me suis cogné partout
J'ai dormi dans l’mouillé
Ca m'a coûté des sous
C'est la d'plaisance, c'est l'pied

Dès que le vent soufflera
Je repartira
Dès que les vents tourneront
Nous nous en allerons

Ohohohohoh hisséo !

C'est pas l'elfe qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'elfe
Moi la mer elle m'a pris
Car je suis un Teleri

Je f'rais le tour du monde
Pour voir chaque étape
Si tous les gars du monde
Veulent bien m'lâcher la grappe
J'irais aux quatre vents
Foutre un peu le boxon
Jamais les océans
N'oublieront mon prénom

Dès que le vent soufflera
Je repartira
Dès que les vents tourneront
Nous nous en allerons

Ohohohohoh hisséo !

C'est pas l'elfe qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'elfe
Moi la mer elle m'a pris
Et mon bateau aussi

Il est fier mon navire
Il est beau mon bateau
C'est un fameux trois mâts
Fin comme un oiseau,

Olwë, Annaël
Cirdan et Riguidel
Naviguent pas sur des cageots,
Ni sur des poubelles

Dès que le vent soufflera
Je repartira
Dès que les vents tourneront
Nous nous en allerons

C'est pas l'elfe qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'elfe
Moi la mer elle m'a pris
Je m'souviens un vendredi

Ne pleure plus ma mère
Ton fils est matelot
Ne pleure plus mon père
Je vis au fil de l'eau
Regardez votre enfant
Il est parti marin
Je sais c'est pas marrant
Mais c'était mon destin

 


Chapter End Notes

La chanson citée à la fin est un détournement d'une chanson de Renaud.


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